Techno Classica 2023 : Deutsch Qualität
En Allemagne, la chose automobile est ce que la gastronomie est à la France : un domaine sérieux ! L’Allemagne excelle dans les modèles haut de gamme, une suprématie qui ne date pas d’hier comme le rappelle le Techno Classica, le plus grand salon au monde dédié à la voiture de collection. Qu’elle soit ancienne ou plus moderne…
Texte et photos Thomas Riaud
L’Autobahn qui file sur Essen depuis Düsseldorf donne déjà le ton, celle-ci bénéficiant, comme de nombreux tronçons autoroutiers germaniques, d’une vitesse libre. Cela se passe le mieux du monde entre adultes responsables, à plus de 180 km/h, loin de tout jugement de valeur inquisiteur et de radar fourbe. Forcément, à cette allure, j’arrive rapidement au « Messe » d’Essen, le centre des expositions où se tient chaque année, depuis 1989, le désormais incontournable « Techno Classica ».
En l’espace d’une trentaine d’années, le Techno Classica est devenu le rendez-vous incontournable pour tous les passionnés d’automobile anciennes. Et cela est un événement « à l’allemande », comprenez du genre « kolossal », en ressemblant par bien des aspects à notre Rétromobile… mais à l’échelle du Mondial de l’Auto ! Pour bien situer les choses, on trouve réparti dans 7 immenses halls plus de 1250 professionnels venus d’une trentaine de pays exposer tout ce qui a attrait à la voiture ancienne ou d’exception. On y trouve de tout, de la pièce détachée introuvable à de l’automobilia, sans oublier les voitures en elles-mêmes, des modèles plus neufs que neufs et souvent rares. Voire très rares, car parmi les milliers d’autos présentées, ces marchands de rêve proposaient quelques « pépites » qui valaient de détour. Des modèles d’exception de toutes marques, anciens ou plus récents, qui s’offraient sans pudeur à la vue des quelques 188 000 visiteurs annoncés durant cet événement !
On le sait, l’Allemagne est une grande puissance automobile, et ce Techno Classica nous le rappelait de façon insistante, avec une pléthore de BMW, Porsche ou Mercedes. Mercedes justement, occupait à lui seul plus de la moitié du hall n°1. Outre le stand officiel du constructeur, qui célébrait les 60 ans de la mythique 600, on pouvait y admirer une rarissime CLK GTR roadster. Et que dire des stands de certains professionnels spécialisés sur la marque à l’étoile, qui proposaient pour certains une pléthore de SLS (dont une Black Serie !), et même une SLR McLaren Stirling Moss, une barquette monstrueuse construite à 25 exemplaires qui vaut désormais plus de 2,5 millions d’Euros ! Un mot pour finir avec Mercedes sur la présence du préparateur Brabus, qui persévère avec talent dans la restauration et la vente de modèles « classic », comme la fameuse 300 SL « papillon » ou la Pagode.
En déambulant dans les autres halls (prévoir de bonnes chaussures !), il était facile de s’arrêter en extase devant d’autres modèles exceptionnels. Les allemands jouant à domicile, BMW tenait une bonne place, avec la présence remarquée de mythiques M1 (version de série ou de compétition), sans oublier le roadster Z8, dont sa valeur ne s’est jamais démentie au fil des ans. Mais la sportive la plus commune venue en force est fabriquée du côté de Stuttgart, chez Porsche en particulier, à travers un nombre incalculable de 911. Et cela n’est pas seulement dû au fait qu’elle célébrait ses 60 ans cette année. Il y en avait pour tous les goûts, et toutes les bourses, avec des 911 Classic parfaitement restaurées, qui dépasse facilement les 180 000 €, mais aussi de nombreux modèles plus contemporains, dont des Turbo et GT3 RS, vendus encore bien plus chers, dépassant pour certains les 300 000 € ! Et que dire des modèles de compétition, comme une authentique Audi quattro Groupe 4 de rallye ex-Michèle Mouton, proposée à… 950 000 € !
Vous l’aurez compris, les allemandes occupaient une bonne place sur les divers stands, mais une forme de parité était respectée avec la présence en nombre de belles italiennes. Le stand dédié à Ferrari, à tomber, présentait par exemple presque toute la gamme actuelle de la SF 90 Stradale à la Roma, mais n’hésitait pas à revisiter pour l’occasion ses gloires passées, en exposant des F40, 511 BB et autres Testarossa, toujours aussi populaires auprès des tifosi. Les tifosi, on en trouve aussi en nombre chez Alfa Romeo, et quelques raretés susceptibles d’exciter leurs sens avaient fait le déplacement, notamment la très rare 8C Competizione, déclinée à 500 exemplaires en coupé et en roadster, dont chaque version était à vendre. A quel prix ? Mystère, mais on les devine du genre élevés. Très élevés !
« Prix sur demande »
C’est d’ailleurs lorsque l’on voit « prix sur demande » indiqué discrètement en bas des affichettes placées devant les voitures que l’on se doute que l’on atteint des niveaux stratosphériques que la bonne morale réprouve. Une pratique largement répandue chez de nombreux spécialistes mettant en vente d’autres beautés latines, notamment des Lamborghini. Des anciens tracteurs de la marque, à l’iconique Countach, les modèles de la fameuse officine au taureau étaient mis à l’honneur à travers une sublime exposition, mettant notamment en vedette la Miura, première supercar avant l’heure sortie en 1966.
D’autres devaient se dire « à nous les ptites anglaises », en découvrant quelques joyaux de la couronne britannique, notamment un break de chasse Aston Martin Vanquish revisité par le carrossier italien Zagato, une « bricole » pour le moins exotique assemblée à la main, et au compte-goutte à partir de 2020, qui avoisine aujourd’hui le million d’Euro. Toujours au rayon des curiosités, on pouvait admirer une Zagato Mostro Barchetta, un roadster ultra-exclusif dessiné par le même designer mais construit sur base Maserati, qui a été fraîchement dévoilé au concours d’élégance de la Villa d’Este en 2022. Evidemment, cette rareté produite elle aussi en toute petite série, s’affiche bien au-delà du million… Mais vous allez voir que ce qui est très rare n’est pas forcément toujours beau, ni hors de prix. Mais tout est relatif !
C’est que qu’on se dit en croisant l’improbable MG XPower SV-R, un coupé complètement méconnu mais qui ne démérite pas. Il s’agit de l’ultime MG construite en toute petite série également, en 2005 jusqu’avant sa faillite. L’engin, délirant, est doté d’un V8 5.0 de Ford Mustang de 385 ch, capable de propulser ce paquet de muscles de 1500 kg à plus de 280 km/h. Vendue 128 000 € à l’époque, cette MG pour le moins exotique et radicale n’a guère rencontré le succès à l’époque, d’où une extrême rareté qui lui donne tout son sel aujourd’hui. En tout cas, le jour de notre venue elle a su séduire un amateur, le panneau « sold » ayant été posé sur son pare-brise ! Mais il existe fort heureusement des autos très désirables, vendues à des prix plus démocratiques. Car le Techno Classica met à disposition à l’extérieur de vastes espaces où les particuliers viennent vendre en direct leur voiture. De la populaire Opel Granada de grand-père Rudolph à la Coccinelle de tante Greta, en passant par la plus prestigieuse Mercedes SL R107 (celle de Bobby Ewing dans Dallas !), on trouve de tout, à tous les prix. Et là encore, on peut tout voir avoir : il suffit de demander. Et de payer !